Un peu de contexte:
Les phénomènes de mode touchent aussi l’apiculture. Les fabriquants de matériel l’ont bien compris et proposent des tas de gadgets à destination des apiculteurs. Cela va de la ruche connectée via une balance en passant par les puces antivols, les appareils anti-varroa très sophistiqués et bien sûr la ruche soi-disant la plus écologique du marché. Heureusement, pour l’instant, l’apiculteur n’est pas vraiment un geek et la plupart savent encore qu’ils travaillent avec du vivant.
On se rappelle tous cette ruche mise sur le marché par des australiens où il suffisait de tourner un robinet pour récolter le miel. Qui connaît un minimum l’apiculture en rigole. En attendant, à l’époque, ils avaient soulevé beaucoup de fonds via un financement participatif et vendu leur ruche. Dont je pense 99% reposent maintenant au fond du garage.
Définition de la ruche écologique:
Une simple recherche internet nous apprend que l’écologie est l’étude des interactions des êtres vivants et de leur milieu. Le mot est construit du grec oîkos (maison, habitat) et lógos (discours). Donc c’est quoi une ruche écologique ? Puisque par définition la ruche est un lieu d’interactions et ce quel que soit son format. Plutôt qu’écologique, naturelle serait peut-être plus juste. Dans la vraie vie les essaims qui quittent la ruche, s’ils ne sont pas récupérés par un apiculteur, s’installent dans des lieux divers et variés. Dans une cheminée, un trou dans un mur, derrière un volet, un tronc d’arbre creux et même sous une terrasse d’appartement. Je devrais donc en conclure que toutes ces ruches sont écologiques ? Elles sont en tout cas naturelles et acceptables d’un point de vue de l’abeille.
L’apiculture écologique:
Par extension on parle d’apiculture écologique. C’est à celui qui sera le plus écologique ! Pour moi une apiculture écologique ne veut rien dire. Par définition toutes les apicultures le sont puisqu’elles favorisent les interactions entre les abeilles domestiques et leur milieu. Et peu importe les conditions dans lesquelles sont traitées les abeilles. Vendre à tout va de l’apiculture écologique me parait contre-productif. Je viens de lire un livre fort intéressant d’Alain Péricard, « L’abeille et la ruche », sous-titré « Manuel d’apiculture écologique ».
Sans remettre en cause le propos ni la qualité du texte je ne vois pas en quoi cette apiculture est plus écologique qu’une autre. L’auteur aime ses abeilles et fait de l’apiculture extensive. C’est sur ces 2 points que sa démarche se démarque de bien d’autres apiculteurs. Il a par ailleurs installé ses ruches dans un endroit protégé des pesticides ce que tout à chacun devrait pouvoir faire. Mais ces paradis pour abeilles deviennent l’exception et non la règle. Ci-joint le lien sur son site : http://www.site.rucherapis.ca.
Et je vous recommande la lecture de son livre.
Les formats de ruche écologique:
A défaut de vraie apiculture écologique, chacun vante sa ruche écologique. Celle qui a le vent en poupe actuellement est la ruche Warré du nom de son inventeur (un abbé comme il se doit). La ruche kenyane est en train de se faire également une belle réputation. Je ne me permettrai pas d’émettre un jugement sur ces formats. Je ne les connais pas d’un point de vue de leur utilisation. De mon côté, jusqu’à il y a peu, je pensais que la vraie ruche écologique était la ruche tronc.
Du coup je me suis documenté et j’ai lu le livre de Henri Giorgi « La ruche tronc ». Je vous recommande sa lecture et son site internet. Sa démarche est d’autant plus intéressante qu’il a pratiqué et vécu de nombreuses années d’une apiculture intensive. Mais au bout du compte, au fil de la lecture, on apprend que les interventions sur une ruche tronc sont loin d’être négligeables: nourrissements, traitement contre le varroa, élimination des vieilles cires, récoltes du miel pour le moins compliquées, création d’essaims artificiels). Et le format de la ruche tronc rend au final toutes ces manipulations difficiles et hasardeuses (jusqu’à devoir la coucher). Bref, avec mes Dadant 12 cadres et mes cadres à jambage j’ai eu l’impression à la fin de ma lecture que mon apiculture valait bien la sienne en termes de respect, de naturel et de bienveillance.
Conclusion:
De mon point de vue ce n’est pas la ruche qui est écologique, ni l’apiculture et encore moins l’apiculteur. Le terme écologique est juste devenu un qualificatif pour dire qu’on respecte le vivant et la nature dont nous faisons partie intégrante. Et c’est notre façon de travailler avec les abeilles qui nous définit. Personnellement, face au monde fascinant des abeilles, j’essaie de faire preuve d’humilité et de respect. C’est comme ça que j’aime à décrire l’apiculture que je pratique et si c’est ça l’apiculture écologique alors ça me va !
